LUXEMBOURG KIRCHBERG
BIBLIOTHÈQUE NATIONALE
Etude :
Réalisation : 2003
Surface :
Coût :
Maître d'ouvrage : ÉTAT DU LUXEMBOURG
Architectes : EMMANUELLE BEAUDOUIN, LAURENT BEAUDOUIN, STEPHANE GUTFRIND, VINCENT DUVIVIER
Architectes assistants : HEE MOON, AURÉLIE HUSSON, MARC BRINGER

CONCOURS INTERNATIONAL 3° PRIX

Situé au coeur du Kirchberg, le projet de Bibliothèque Nationale du Luxembourg dessiné par l’atelier Beaudouin et l’atelier d’Architecture du Centre, complète la composition du site, sans concurrencer la présence des autres bâtiments. La continuité avec la place et le rapport au paysage constituent les deux axes majeurs de la composition. La Bibliothèque dessinée par Emmanuelle Beaudouin, Laurent Beaudouin, Stephane Gutfrind et Vincent Duvivier est un édifice dont la figure en L semble s’élever doucement au-dessus des arbres. Le bâtiment se plie pour émerger des frondaisons et former un point de repère visible depuis la ville. Il encadre par une fine ligne verticale le bâtiment de la Philharmonie et en préserve l’échelle, en diminuant le long de la place le gabarit du bâtiment existant, ainsi, la hauteur de la Bibliothèque Nationale sur la place ne dépasse pas celle de la Philharmonie. Le projet de l’atelier Beaudouin et de l’atelier d’Architecture du Centre, se présente comme un édifice majeur tout en évitant l’impression d’une excessive monumentalité. Il regarde le paysage autour de lui et se fait voir de loin, sans être pour autant écrasant par rapport à ses voisins. La bibliothèque marque le paysage par sa présence, mais en respecte la nature. La beauté du site et l’exceptionnelle situation de la Bibliothèque Nationale vis-à-vis de la ville de Luxembourg est exploitée pour donner à l’intérieur le maximum d’agrément. L’ouverture de la Bibliothèque sur une nature d’où émerge la silhouette de la ville est le thème central du projet. Les salles de lecture de la Bibliothèque forment un belvédère où la forêt se détache en premier plan sur le paysage urbain.

Dans son rapport au contexte, le projet repose sur deux idées parallèles :

1° – Étendre visuellement la place jusqu’à la forêt à travers le rez-de-chaussée et la périphérie de la Bibliothèque. L’espace ouvert de la place publique atteint ainsi la lisière de la forêt donnant une grande visibilité aux activités intérieures du bâtiment. Le choix a été fait de ne pas donner à la Bibliothèque une impression de fermeture et de retranchement, mais au contraire de favoriser l’idée qu’elle est un lieu culturel majeur, au caractère accueillant et facilement accessible au public.

2° – Étendre la forêt jusqu’à la place en poursuivant en périphérie du bâtiment la pente douce du terrain pour englober l’épaisseur du socle existant dans la topographie et entourer l’édifice d’un ensemble dense de plantations, qui préserve et renforce la beauté naturelle du site.

Le projet souligne en permanence au long de son parcours intérieur, le rapport étroit entre la nature et l’édifice par un effet de transparence qui donne le sentiment de pouvoir lire dans la forêt et de s’élever doucement au-dessus du niveau des arbres jusqu’à découvrir la vue splendide vers la Ville de Luxembourg.

Le contrôle de la lumière et de la vue est le thème architectural majeur de la Bibliothèque. La lumière est nuancée ainsi de façon différente suivant l’orientation des façades :

La façade Ouest a fait l’objet d’une attention particulière parce qu’elle est directement exposée aux rayons du soleil et qu’elle doit être protégé en conséquence. Elle s’ouvre, par contre vers la vue la plus importante sur le plan du paysage et sur le plan symbolique. Nous avons créé une façade à double peau créant un tampon thermique contrôlé à l’intérieur de laquelle sont suspendus des volets en verre sérigraphiés. Ces volets, montés sur des axes en acier, pivotent électriquement au cours de la journée pour atténuer l’effet d’éblouissement et de chaleur de la lumière. Les verres sont sérigraphiés par des fines lignes horizontales qui atténuent fortement la lumière tout en laissant passer la vue. Les vitrages de la double peau sont également sérigraphiés dans leur face intérieure. L’entretien des vitrages se fait à l’intérieur de la double peau par des passerelles coulissantes. Ce principe de façade n’est pas expérimental dans notre travail et a fait déjà preuve de son efficacité et de sa fiabilité.

La façade Est marque la silhouette du bâtiment face à la Philharmonie. Elle forme de plus l’entrée de la Bibliothèque Nationale. Elle est constituée d’un pare-soleil suspendu en porte-à-faux au-dessus de l’entrée. Les verres qui le constitue sont sérigraphiés de la même façon qu’en façade ouest mais sont situés de façon fixe entre des bandeaux de béton blanc horizontaux. Cette façade, par sa régularité, sa transparence et sa légèreté répond à la maille verticale des piliers de la Philharmonie. Le dialogue entre les deux édifices est à nos yeux essentiel pour la réussite de la Place de l’Europe. L’entrée de la Bibliothèque se fait sans emphase, elle est visible grâce à la transparence de la double hauteur qui accentue la présence du hall.

La façade Nord marque le pli vertical du bâtiment. Une élévation du volume à cet endroit précis nous semblait nécessaire sur le plan urbain pour accentuer la visibilité de l’institution dans le paysage. Le statut de ce bâtiment national doit être présent dans l’échelle de perception globale comme la marque de l’entrée sur la Place de l’Europe et le point de départ de l’ensemble urbain du Kirchberg. La façade sur le boulevard est montrée comme le pli de l’intérieur du bâtiment par la continuité des lames de bois employées en plafond du rez-de-chaussée qui se retournent à la verticale pour s’élever sur toute la hauteur.

La présence de lames de bois sur la hauteur de la façade est la marque de la continuité de la nature à travers le bâtiment. Les lames horizontales sont espacées de façon nuancée pour donner un effet de mouvement à la façade, leur finesse laisse apparaître la transparence des espaces intérieurs. Le bois utilisé en façade est rétifié pour lui assurer une permanence dans le temps et éviter les charges d’entretien, à l’arrière se trouvent des vitrages coulissants montés sur des profils aluminium.

La lumière enveloppe le bâtiment sur toute ses faces et se diffuse à l’intérieur par une toiture éclairante surmontée d’un paralume en verre sérigraphié qui réparti la lumière avec douceur dans l’épaisseur de l’édifice. La toiture éclairante permet de répondre à la grande épaisseur du bâtiment pour éclairer les trois niveaux décalés de lecture avec une lumière naturelle atténuée. Le ciel reste visible à travers le toit du bâtiment sans que le soleil ne frappe directement les lieux de lecture. Le verre utilisé pour le paralume et les verrières est sérigraphié avec des fines lignes blanches, pour diffuser la lumière sans laisser passer le soleil. Le paralume et les verrières sont structurés par des poutres de béton blanc. Les chéneaux forment des passages accessibles permettant un entretien aisé des verrières et des pare-soleil. La grille des pare-soleil se plie sur les façades sud dans une même continuité, donnant une impression de retournement de l’espace intérieur.

L’espace intérieur de la Bibliothèque à fait l’objet d’une attention particulière pour assurer un confort qui participe au plaisir de la recherche et de la lecture.

Une attention majeure a été apportée à la qualité acoustique de l’intérieur de la Bibliothèque, à travers l’usage, à tous les niveaux accessibles au public, de plafonds en lames de bois serrées surmontées d’absorbant phonique. Ces plafonds permettent l’intégration invisible des éléments techniques tout en laissant une totale accessibilité. Ils apportent un élément de chaleur visuelle en renforçant l’ambiance feutrée des salles de lecture. Le plafond en lames de bois du rez-de-chaussée se replie à l’extérieur sur la façade nord pour en filtrer la lumière.

Nous avons recherché à rendre visible les secteurs et leurs interactions dans l’organisation des espaces du projet. Chaque niveau conserve l’identité de son secteur mais entretient un dialogue spatial par la géométrie dynamique des vides. Les exigences d’éclairement des espaces respectifs ont dicté l’organisation du programme. Le volume des deux sous-sols pour l’essentiel opaque. Au premier sous-sol les ouvrages étrangers et au deuxième sous-sol, les ouvrages de la Luxembourgensia, ainsi que tous les espaces de livraison.

L’implantation des trames a permis d’envisager la conservation partielle des structures verticales du Bâtiment Robert Schumann. Les structures repérées en rouge sur les files I et V des plans seraient conservées parce qu’elles restent adéquates avec les charges d’exploitation requises pour des bureaux. Cette frange de structure bordant la Place de l’Europe correspond au déploiement des bureaux des services internes des niveaux de consultations.

Un entresol permet d’intégrer à un degré de sécurité maximale parce que situé au cœur du bâtiment, le magasin des documents précieux, leur charge d’exploitation occupe les structures centrales.

L’accessibilité des lecteurs et du personnel aux différents secteurs de la programmation est régie par le principe des zones hors-douane et sous-douane. Un des noyaux de circulation verticale placé sue l’angle de la place et accessible depuis le hall permet l’autonomie des accès aux manifestations temporaires et au restaurant en dehors des heures d’ouverture de la Bibliothèque. La lisibilité de la figure architecturale proposée, les relations subtiles qu’elle entretient avec son site a trouvé un écho spatial clair dans l’organisation des plateaux. Leurs dalles s’enroulent autour du vide à géométrie variable du déambulatoire pour s’inscrire dans un parcours fluide et lisible mettant en première niveau de mezzanine les espaces de la Luxembourgensia.

La Bibliothèque Nationale du Luxembourg est composée de deux éléments bâtis étroitement liés répartissant de manière distincte la partie accessible au lecteur de celle réservée au personnel. La Bibliothèque se développe sur huit niveaux hiérarchisés et constituant une superficie importante permettant de retirer en continuité la place à la forêt. A cette emprise, vient se déployer plusieurs niveaux de service essentiellement lié au personnel qui bénéficient de la qualité environnementale du site.

Les espaces de consultation reposent sur un socle contenant en partie les magasins, les locaux techniques, la crèche. L’espace de livraisons est situé en face de la livraison de la Philharmonie.  Ce socle contient sur 2 niveaux les magasins accessibles directement par le personnel par des ascenseurs et monte-charge réparties sur la longueur du bâtiment.

L’accès à la Bibliothèque se situe au niveau de la place face à la Philharmonie. par un grand sas en double hauteur. Le lecteur arrive dans  un espace hors douane d’où il peut accéder à la boutique, à la zone d’exposition permanente en façade Est, à la zone d’exposition temporaire et à l’auditorium par un espace de circulation pouvant être fermé en dehors des horaires de fonctionnement. La zone sous-douane de la Bibliothèque se situe dans la continuité transversale du bâtiment. Deux entrées à accès contrôlé se situent également sur la place. Un accès sur l’angle Nord Ouest dessert l’aile verticale du bâtiment,  il est utilisé de manière indépendante et en dehors des heures d’ouverture de la Bibliothèque permettant de faire fonctionner le restaurant, l’administration, les salles de formation, l’auditorium et l’exposition temporaire de façon indépendante.

Cet accès est aussi l’entrée du personnel de la Bibliothèque. La deuxième entrée sur l’angle Sud-Est fonctionne sur le même principe d’accès contrôlé pour les sociétés savantes. La surveillance de ces accès est assurée par le bureau du gardien situé en rez-de-chaussée.

Une fois la zone sous douane franchie, le lecteur arrive dans un espace se développant sur toute la longueur du bâtiment. A ce niveau se situent les espaces de références et les périodiques. L’accès aux niveaux supérieurs peut s’effectuer selon plusieurs façons : quatre ascenseurs public répartis aux deux extrémités du bâtiment,deux larges escaliers ouverts et une rampe le long de la façade Ouest. Les escaliers et la rampe se développent dans la partie triple hauteur du bâtiment participant ainsi au parcours visuel et reposant de la forêt environnante. Ce dispositif de  distribution qualifie tout particulièrement la situation de l’espace Luxembourgensia, terminaison remarquable de la rampe d’accès et de la superstructure audacieuse de la façade Ouest cadrant la perspective vers la ville historique.

Un volume suspendu et opaque accompagnant la rampe dans le parcours se situe au niveau entresol. Ce volume renferme les deux niveaux de magasin des ouvrages précieux et du CEDOM. L’entresol n’étant pas accessible au public , la rampe continue son parcours jusqu’au niveau 1 où se développe le CEDOM et la médiathèque le long de la façade. La CEDOM et la médiathèque bénéficient d’une triple hauteur renforçant ainsi sa fonction exceptionnelle de liaison visuelle vers la Philharmonie. Cette situation sur rue renforce la volonté d’annoncer le bâtiment de la Philharmonie, dans la progression visuelle du parcours visuelle extérieur en arrivant sur le site.

Les espaces de consultation se développent sur 3 niveaux à partir desquels la vision extérieure sur la ville se dégage. Le premier niveau est consacré à la consultation Luxembourgeoise et les deux niveaux supérieurs concernent la consultation non Luxembourgeoise réparties en quatre unités. Tous ces espaces de consultations s’ouvrent largement en façade Ouest, Nord et Sud bénéficiant ainsi d’une vue panoramique sur la ville. En façade Est, se développent les services internes affectés à chaque espace de consultation correspondant. D’une façon générale, chaque niveau situé en façade Est sur la place des bureaux, rendant ainsi possible la préservation d’une partie du bâtiment Schumann dans sa structure et la hauteur de ses niveaux sur tout le côté de la Place de l’Europe.

La partie que nous avons jugé plus autonome dans son fonctionnement, se situe dans l’aile verticale du bâtiment. Celle-ci est accessible soit directement depuis le hall hors douane au niveau rez-de-chaussée, soit en dehors des heures d’ouverture de la Bibliothèque par l’accès autonome depuis la place avec dans tous les cas un accès sécurisé et surveillé. Chaque niveau de cette aile bénéficie d’une vue sur le paysage ainsi que d’espaces de détente intérieur et extérieur. Dans cette aile, nous retrouvons les services liés aux locaux du personnel, les services internes dont la bibliothéconomie, les espaces de formation, l’administration et le restaurant.

Nous avons situé le restaurant au niveau haut car nous avons souhaité que chaque convive puisse bénéficier d’une vue exceptionnelle de son environnement. Agrémenté d’une terrasse extérieure ouverte sur le paysage, la salle de restaurant permettra également d’apprécier l’environnement construit de la Place de l’Europe. Au niveau immédiatement inférieur, se trouve l’administration. Celle-ci bénéficie d’un accès direct vers le restaurant vers une salle à manger pouvant être fermée de façon autonome pour des occasions exceptionnelles.